L’Europe inflige 1 milliard d’euros à cinq banques pour leur rôle dans les cartels de change
Les traders de Barclays, Citigroup, JPMorgan Chase, Mitsubishi UFJ Financial Group et la Royal Bank of Scotland se sont livrés à des pratiques de concurrence déloyale selon la Commission européenne.
Une enquête a en effet révélé que ces traders partageaient des informations sensibles et coordonnaient leurs stratégies dans des groupes de discussion sous des noms tels que « Three banana split » et « Semi Grumpy Old men ».
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Une amende record de 1,07 milliard d’euros
La Commission européenne a annoncé jeudi dernier avoir infligé à Barclays, Citigroup, JPMorgan Chase, Mitsubishi UFJ Financial Group et à la Royal Bank of Scotland une amende d’un montant total de 1,07 milliard d’euros pour leur rôle dans des cartels de change. Cette amende faisait suite aux plusieurs milliards d’euros d’amendes imposés par diverses autorités de réglementation aux grandes banques en 2014 et 2015 pour leur participation à la manipulation du marché des devises.
Les actions de la commission découlaient de ce qu’elle considérait comme des pratiques anticoncurrentielles de la part de deux cartels ayant opéré de 2007 à 2013. Des enquêtes antérieures mais connexes menées par le ministère de la Justice et par des régulateurs aux États-Unis, en Grande-Bretagne et en Suisse avaient porté sur des affaires de conduite criminelle et de violations civiles. Ce qui avait par la suite accru la surveillance de leurs bureaux de négociation de devises.
« Les activités de trading au comptant sur devises constituent l’un des plus grands marchés du monde, pour une valeur quotidienne de plusieurs milliards d’euros », a déclaré Margrethe Vestager, commissaire européenne chargée de la Politique de la concurrence, dans un communiqué de presse publié jeudi. « Le comportement de ces banques a sapé l’intégrité du secteur aux dépens de l’économie mondiale et européenne et des consommateurs. »
Des forums de discussion pour mettre au point des stratégies de change
Les traders individuels de chacune des cinq banques ont échangé de grandes quantités de devises, notamment l’euro, la livre sterling, le yen et le dollar américain, pour le compte de grandes entreprises, de fonds de pension et de gestionnaires d’actifs.
L’enquête de la Commission a révélé qu’ils avaient échangé des plans d’action, partagé des informations sensibles (notamment les détails des ordres de leurs clients et des preuves de leur identité) et même coordonné des stratégies lors de discussions sur les terminaux Bloomberg.
« Certains traders ont créé des forums de discussion puis se sont invités, en fonction de leurs activités commerciales et de leurs affinités personnelles, à créer des cercles de confiance fermés », a déclaré la commission dans un communiqué de presse.
Une des amendes imposées par la commission, couvrant les communications des traders dans trois forums de discussion, coûtera à Barclays; la Royal Bank of Scotland, le RBS Citigroup et JPMorgan environ 811 millions d’euros au total.
Les groupes, qui portaient le nom de « Three banana split » et « Only Marge », auraient été opérationnels de décembre 2007 à janvier 2013, a annoncé la commission.
UBS aurait été impliqué dans ces malversations
Une deuxième amende concernait un forum de discussion connu sous le nom de « Essex Express », car les traders concernés vivaient à Essex, un comté du nord-est de Londres. Les membres se réunissaient visiblement dans un train pour la ville, a annoncé la commission.
Le forum de discussion Essex et celui nommé «Semi Grumpy Old Men» ont fonctionné de décembre 2009 à juillet 2012. Barclays, RBS et la banque Mitsubishi, qui s’appelait alors Bank of Tokyo-Mitsubishi et est largement connue sous le nom de MUFG, ont été condamnés à une amende de presque 258 millions d’euros par la commission pour les activités liées à ces deux forums
UBS était impliqué dans les deux groupes. Mais n’a pas été condamné à une amende pour avoir révélé l’existence de ces cartels à la commission. La banque a ainsi évité une amende de 285 millions d’euros.
« UBS a été la première banque à divulguer une éventuelle malversation», a déclaré la banque dans un communiqué envoyé par courrier électronique jeudi. « Depuis, nous avons effectué des investissements importants pour renforcer notre système de contrôle. Et nous sommes ravis que cette affaire soit résolue. »
UBS faisait partie du groupe des plus grandes banques du monde qui ont versé 4,25 milliards de dollar en 2014 après avoir été sous le coup d’une enquête pour tentatives de manipulation du marché des devises par des régulateurs britanniques, suisses et américains.
Les banques implorent la clémence
À l’exception de MUFG, les banques identifiées par la commission jeudi ont demandé à bénéficier de la clémence de la commission européenne. Elles ont reçu des amendes moindres en échange de leur coopération avec les enquêteurs. Les cinq banques ont bénéficié de réductions distinctes de 10 % pour avoir reconnu leur participation aux ententes.
Citigroup, JPMorgan, Barclays et la Royal Bank of Scotland ont plaidé coupable en 2015 pour des infractions fédérales aux États-Unis et, avec UBS, ont versé 5,6 milliards de dollars de pénalités pour avoir manipulé la valeur des devises.
Les amendes annoncées jeudi ne sont cependant peut-être pas le dernier mot de la commission. Elle a en effet déclaré sa volonté de « poursuivre d’autres procédures en cours concernant les pratiques passées sur le marché du trading sur le Forex »
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